Retour à la maison
Le départ
Les valises sont bouclées, plus lourdes encore que pour venir ici. Il faut se mettre en civilisé. Il faut régulariser tous les comptes. Les différents repas de la semaine passée, les consommations du bar. Serrer la main, embrasser tout le monde, souhaiter un bon voyage à ceux qui ne partent que demain. Il fait encore très chaud, appuyé sans doute en cela par l’atmosphère de ce départ. La nuit est tombée.
Pour éviter à Ousmane de rentrer trop tard chez lui, je lui ai demandé de me conduire à l’aéroport vers vingt heures alors que l’avion n’est annoncé que partant à zéro heures cinquante. Je rappelle qu’Ousmane doit faire 11 kilomètres en vélo par des routes de terre dans la nuit pour rentrer chez lui et qu’il a certainement près de 60 ans. Il attrape mes bagages et les enfourne dans le minibus. Une boule me noue la gorge en franchissant le portail de l’espace culturel Gambidi. Je réprime un petit sanglot. Je prends conscience qu’une page s’est tournée. Ce voyage, cette immersion africaine de 3 semaines m’a profondément bouleversé. Je ne l’imaginais pas à ce point. Ce que j’ai vu, ce que j’ai côtoyé, ceux que j’ai rencontré m’ont fait toucher du doigt ce que la radio, la télévision, les médias disaient, mais créaient une distance entre ces éléments et nous. La pauvreté, la misère, le grand fossé entre notre monde et celui ci en terme de progrès, de modernité, tout cela est bien présent, palpable mais j’ai vu aussi un peuple souriant, accueillant, généreux, travailleur, pas forcément résigné, volontaire et qui en demande.
Le minibus de l'espace culturel n'est plus tout à fait dans cet état aujourd'hui.
De tous mes yeux, je regarde encore une fois Ouagadougou. Ce n’est plus avec les mêmes yeux. J’écoute le bruit de la ville. Il y a encore mille images qui s’archivent dans ma mémoire. Le voyage en minibus est presque trop court et quand Ousmane me dépose à l’aéroport, j’ai envie de lui dire de prolonger encore le trajet.
Les lumières fortes du hall de l’aéroport me happent brutalement. Je remercie Ousmane, sincèrement en lui faisant un cadeau, une solide poignée de main prolongée et je me retrouve seul devant la porte du sas qui va me faire changer de monde. Je rassemble les papiers nécessaires pour franchir ce sas que des policiers gardent avec zèle.
La salle ne paraît pas grande sur cette photo mais 3 heures seul dans cet espace, cela vous semble plus grand.
De l’autre côté de la vitre, côté départ, ça y est, la vue n’est plus la même. C’est une grande salle vide pour l’instant. Les écrans au-dessus des guichets annoncent encore le départ de l’avion pour Roissy Charles de gaulle qui vient de décoller il y a quelques minutes. J’ai 3 heures à attendre. Ouagadougou, n’est pas Roissy Charles de Gaulle et ce n’est pas la foule dans l’aéroport. Donc, je m’installe dans un coin au milieu de mes valises, je récupère le livre que Claude m’a offert et je me plonge dans sa lecture.
Aïe, des nuées de moustiques volent en formation serrée autour de moi. Où ai-je rangé mon spray anti moustiques spécial tropiques ?
La lecture me permet de faire passer un plus vite cet entre temps.
Vers onze heures 30, l’agitation est un peu plus fébrile. Les passagers arrivent, les guichets vont s’ouvrir. Je vais être un des premiers à franchir ces nouveaux sas que sont le guichet, le premier douanier qui détaille le questionnaire rempli quelques instants auparavant puis la douane des bagages. C’est plus rapide qu’à l’arrivée il y a 3 semaines.
Il n’y a pas grand chose à dire sur le voyage de retour, l’aventure est finie… physiquement, elle va se poursuivre dans ma tête, longtemps sans doute. Le retour passe par Niamey au Niger. Un saut de puce de 45 minutes avant de prendre la route de Casablanca. Encore 3 heures d’attente. Déjà, la température n’est plus ka même, 21 degrés à 1 heure du matin à Ouagadougou. 7 degrés à 6 heures du matin à Casablanca et il fera 11 degrés, un ciel plombé, bas et triste en atterrissant à Paris Orly. Il reste le trajet Paris Nantes en train, encore 2 heures.