Le Grand Marché de Ouagadougou

Fin de journée, dimanche 4 novembre

Le retour a été long, et Gilles souffrait sur son siège , essayant de faire bonne figure sur une route pas vraiment des plus confortables. Issouf, en chauffeur attentionné, évitait les trous, cherchait les meilleures trajectoires et s ‘arrêtait à la demande pour se dégourdir les jambes. Malheureusement pour nous, il n’avait qu’un CD qui passait en boucle pendant les 360 kilomètres et entendre sur des airs de reggae la rage, la rancœur contre les blancs, il y en avait un peu marre à la fin, chacun rongeait son frein et feignait de ne pas entendre en regardant le paysage défiler.

C’est le soulagement quand nous déposons Catherine et Gilles au CMI, Centre Médical International à Ouagadougou. Nous les laissons là pour rejoindre Gambidi. Prendre une bonne douche et attendre des nouvelles de notre éclopé.

Rien de trop grave si ce n’est une surveillance accrue, du repos et quelques médicaments payés relativement chers. Gilles a sa journée du lundi pour se reposer, lui commence ses cours mardi matin, cours portant sur le costume et le stylisme dans le théâtre.

Issouf reste à notre disposition pour la fin de cette journée ainsi que pour la journée du lendemain, telle que la réservation en a été faite. On va en profiter.

Lundi 5 novembre

Catherine et Gilles retournent au CMI pour chercher des résultats d’analyse et nous en profitons pour aller au grand marché de Ouaga. La recherche des magnifiques tissus africains est une expédition à elle seule. Nicole sort une liste très détaillée de ce qu’elle veut trouver, Jacqueline fait le point des objets qu’elle veut rapporter au nom de l’association.

Le Grand marché, bâtisse récente de briques rouges construite récemment en lieu et place de l’ancien marché tellement vétuste qu’il a brûlé entièrement il y a quelques années. C’est un labyrinthe aux allées étroites où se serrent les boutiques en caverne d’Ali Baba. Attention aux 40 voleurs !

Les tissus sont magnifiques mais il faut être vigilent sur la provenance, sur le mode de fabrication et ne pas craindre le baratin des vendeurs qui nous suivent d’une boutique à l’autre, qui nous interpelle d’une échoppe pour nous entrainer vers une autre. Heureusement, je suis avec des  personnes rompues à ce genre d’exercice.

-       «Bonne arrivée Nassara, viens voir dans ma boutique, j’ai des beaux pagnes pour toi ».

-       « Mon capitaine, tu veux une chemise, regarde, tu vas être magnifique , regarde ! ».

-       « Une belle chemise pour le barbu toubab ! ».

Et ce n’est plus un vendeur mais 3, 4 puis 5, on ne sait plus où donner de la tête, de la voix, des yeux car tous tournent autour de toi, décrochent le tissu que tu as eu le malheur de regarder un peu plus longtemps que les autres. Ça finit par être insupportable ! Nicole a même dû se fâcher pour avoir la paix et la possibilité de prendre son temps.

-       « Attention, je veux la paix, le premier qui parle à partir de maintenant, je m’en vais ! ».

Et c’est devenu un ballet muet autour de Nicole, chacun présentant sa pièce de tissu sans dire un mot mais en faisant des pieds et des mains pour être le plus près possible. Je pouffais de rire.

L’après-midi, je terminais la soirée à faire le point du matériel et des lieux de la salle d’art plastique fermée depuis le mois de juillet. La poussière rouge s’est infiltrée partout, jusque dans la remise où sont rangés les papiers à dessin le placard aux pinceaux et peintures, même dans la petite bibliothèque. Les livres d’art font grise mine. Il faut un grand dépoussiérage. Ce que je fais ne suffit pas. Demain matin, j’ai quelques apprentis artistes et mes 4 étudiants en Art et Communication de l’Université.